En tant que cadre dans l’informatique tu as une très bonne position. Ce n’est pas chauffeur amazon pisté par divers technologies de traçage, ou travailleur sur des tâches ultra parcellisées (genre amazon mechanical turk), ou modérateur d’horreurs postées sur les réseaux sociaux, ou entraîneur d’IA, et j’en passe. Le travail taylorisé n’a pas disparu, au contraire, les systèmes d’information ont généralisé la logique de la ligne de production qui avance implacablement. Sans doute toi même tu le vis parfois, où les tickets, emails, etc, s’accumulent et tu te retrouves comme Chaplin à courir après les tâches.
Pis, tu contribues possiblement à l’édification de tels systèmes, et donc si le techno-féodalisme était une réalité émergente, alors tu aurais des motifs psychologiques pour refuser d’y croire. Tu connais Robert Nozick ? Disons que j’ai une intuition que oui, pour sa politique. Hé bien il a publié un très bon essai en théorie de la connaissance, et il pose le critère suivant pour démarquer la connaissance de la non-connaissance : une connaissance est une croyance vraie (théorie classique) que l’on n’aurait pas si la réalité n’y correspondait pas, et que l’on a si elle est vraie.
Autrement dit, la connaissance est ce qui suit à la trace la vérité dans les mondes possibles. Or ta position dans le monde du travail fait que 1/ il te manque des informations sur la réalité du travail (voir le thermocline de la vérité) 2/ tu as intérêt à ne pas voir ton rôle comme trop horrible.
Il te faudrait donc passer par d’autres moyens de connaissance que ton intuition immédiate ou ce qui passe pour “évident”. Cela ne signifie pas de s’en remettre entièrement, sans réflexion à ce que dis autrui, mais de poursuivre le développement plein et entier de tes capacités d’abstraction, de réflexion, d’empathie, de réflexivité.
Pour commencer à te renseigner tu peux par exemple lire ceci : Réguler la surveillance au travail.
Pour ce qui est de comprendre ce qu’on peut vouloir dire par techno-féodalisme, il faut lire un peu, car il ne s’agit pas de parler de paysans qui triment, mais de comment l’économie marche. C’est une histoire de forme, pas d’intensité. Ce dont on parle, c’est de la façon dont le capital est réparti et accumulé. L’origine du terme c’est l’économiste Yanis Varoufakis.
La référence au féodalisme vient de l’idée que le jeu de nos jours semble plus être de capturer un marché entier, d’accumuler des capitaux (ex tracking des utilisateurs, messages humains de qualité, apps…), et de tout verrouiller pour profiter de la rente. C’est de toute façon peu ou prou la théorie de la start up de Paul Graham, il n’y a pas de mystère. Au lieu d’avoir de la concurrence et des marchés ouverts, tu dois prier pour que par exemple saint Google ne vire pas ton app de son playstore.
Malheureusement dernièrement les dévs, ayant reçu un financement pour ça, se focalisent sur l’imbrication de mini applications dans les messages, et j’ai des doutes sur la sécurité de ça.
S’il se déchire pas à la vitesse de l’éclair moi ça me semble pas absurde.
Minsky (1976) Framework for Representing Knowledge
L’idée continue d’être réutilisée sous d’autres noms, autant revenir à une des premières sources.
Oui, mais je crois que ça aide à ce que les haricots soient plus tendres. En tout cas le sel est nécessaire, sans les haricots restent un peu durs.
Pour l’anticipation, tu peux te dire que tu vas en faire pour toi plus tard le lendemain, tu te les mets bien en évidence sur la table par exemple, que ce soit juste chiant si tu les laisses traîner. Le lendemain ô magie, tu as des haricots prêts à être cuisinés :) Et fais-en plutôt pour deux repas ou trois, comme ça le long processus vaut le coup.
J’arrive à réussir les haricots blancs à tous les coups maintenant :
Le résultat est très fondant.
On peut trouver du kombu royal de Bretagne séché en feuille en ligne pour environ 25€, je crois que j’ai eu 300g pour ce prix, et ça me tient plus d’un an. J’en découpe un morceau en petites lamelles avec des ciseaux et le stocke dans un bocal, pour un usage rapide. Ça fait une source d’iode vegan pas cher et sans passer par un comprimé, en plus d’accélerer la cuisson des légumineuses.
Techno-féodalisme n’est pas forcément synonyme de stabilité à long terme c’est sûr, le terme reste spéculatif. Toujours est-il qu’on peut discuter de cette tendance. De plus, que se passe-t-il quand état et entreprise fusionnent ou sont très proches ? On a plein de cas comme ça après tout, avec les fonds souverains, les lobbyings pour ajuster les règles aux grosse entreprises (ex Macron qui admirait Uber et les recevait quand il était ministre), les entreprises françaises crées par la caisse des dépôts et BPI france, et sinon l’exemple de Musk est le plus visible en ce moment. Et l’état, prosaïquement, c’est une alliance d’organisations qui établit des monopoles sur son territoire, dont tu pourras admettre la relative stabilité à l’échelle d’une vie.
Pour le reste, c’est assez frappant que tu mentionnes le mythe du bon sauvage, car je ne l’ai pas mentionné, ni n’y crois ; ça a l’air de te travailler. Dans les deux cas, pour ton récit historique et sur le confort moderne, je remarque qu’il reste assez eurocentré, car si on change la focale sur le monde entier, on se rend compte que les conclusions que tu en tires ne sont plus valides. Des sociétés moins inégalitaires que la nôtre, ça a existé, et la rencontre des colons allant vers les amériques avec certaines sociétés amerindiennes a été un choc. Voir par exemple ce que disait un chef Mi’kmaq au 17ème siècle, face au missionaire Le Clerq :
Leclercq, Chrestien. « Chapitre V. Des Cabannes & logemens des Gaspesiens ». Nouvelle relation de la Gaspésie, édité par Réal Ouellet, Presses de l’Université de Montréal, 1999, https://doi.org/10.4000/books.pum.1234.
Bien évidemment, pour peu que ce soit une retranscription assez fidèle, cela reste de la rhétorique. Le Clerq rapporte, comme d’autres ethnologues dans d’autres sociétés, des violences, des maladies, la faim, etc. Cependant, il ne faut pas croire que le monde était dans le passé uniforme, et que nos systèmes sociaux actuels sont une fatalité.